Casseroles et arnaque

Le sujet est un peu facile mais l’écriture c’est autre chose et j’aime le style de François Morel. L’académie de médecine n’a jamais déconseillé de commencer sa journée (un peu grisâtre ici) par un sourire. Je ne sais combien de temps dureront ces casserolades, ni qui se fatiguera en premier. Le 8 juin prochain, jour de l’examen de la proposition d’abrogation de la réforme des retraites présentée par le groupe LIOT à l’Assemblée Nationale, constituera sans doute un marqueur de la suite, La majorité relative présidentielle à l’Assemblée fera feu de tous bois pour en éviter le vote, jouant la montre jusqu’à minuit comme elle déjà su le faire.

La cohabitation avait constitué un premier inédit dans le fonctionnement de la 5ème République. La configuration actuelle de l’Assemblée nationale, où le Rassemblement National constitue le groupe homogène le plus important après le parti présidentiel en est un autre. Pour l’instant, la politique et la rigidité du Gouvernement, à commencer par celle de la première ministre, semblent servir la dame aux chats qui, à défaut d’être une grande débatteuse, sait s’amuser. L’écart est grand entre ses déclarations à destination des pauvres et des précaires et ce que vote son groupe. Mais qui s’en soucie quand notre ministre de l’intérieur va jusqu’à la trouver molle sur certains sujets…? Rappeler par exemple, que cette défenseure du pouvoir d’achat a voté contre l’augmentation du Smic, par exemple, tombe dans un vide sidéral.

Rien à voir. Je reçois, dès potron minet ce matin, le SMS suivant :

« Dernière relance pour le renouvellement de votre carte vitale, Veuillez vous réactualiser avant le 22/05/2023 pour conserver vos droits. »
Suivait ce lien : http//Asurancemeli.info
Puis un appel à rester vigilant car le Covid-19 est toujours là, sans doute pour donner de la crédibilité au message.

J’ai tout de suite flairé l’arnaque (qui n’aimerait pas se réactualiser ! et puis le numéro de téléphone émetteur ne correspondait pas à ceux utilisés par l’assurance maladie pour nous contacter : 3646 le plus souvent) mais j’ai voulu tout de même voir ce que cachait le lien et en cliquant dessus je suis arrivée sur une page Assurance maladie assez bien contrefaite (du moins il m’a semblé sur mon petit écran) contenant un formulaire que je me suis bien gardée de remplir. Le but des escrocs étant, comme toujours, de récupérer vos données bancaires.

J’avais déjà eu droit à des messages de ce genre :

Mais il semble que le site Assrancemeli.info soit assez récent si j’en crois ce qu j’ai pu trouver sur lui sur la toile.

Les messages comminatoires sont anxiogènes et on n’est jamais trop prudent.

Eurovision

Je crois que c’est la compétition la plus kitsch au monde : des looks improbables, des musiques souvent pauvres et des textes à l’unisson.

Il fut un temps pourtant où ce « machin » a représenté une sorte de permission de minuit pour la gamine que j’étais. Cela se passait à l’hôtel Ayestaran sis à Lecumberri (aussi orthographié Lekunberri), petit village du pays basque espagnol. Pendant une bonne dizaine d’années, mes parents, mes frères et moi y avons passé nos vacances de Pâques. Il y avait pas mal d’enfants, notamment une famille barcelonaise qui avait également pris ses habitudes pascales dans cet hôtel. De trois au départ, la fratrie s’était agrandie jusqu’à six. Trois garçons, trois filles habillés pareil, impeccablement coiffés et parfumés qui descendaient prendre leur petit déjeuner quand nous nous apprêtions à sortir faire notre petite randonnée matinale (il y avait celle du matin et celle de l’après-midi sauf quand on allait à Pampelune à 30 kilomètres de là ou qu’on avait décidé de visiter les environs).

Mercedes avait mon âge. Les barcelonais ayant le droit de regarder la télé le soir, je finis par avoir ce droit aussi et c’est ainsi que j’ai croisé l’eurovision ou plus exactement sa finale. L’image, un peu tremblante, était en noir et blanc. Un petit reportage présentait succinctement l’interprète, puis venaient les chansons et enfin le long chapelet des notes (en points) données à la prestation par les jurés représentant les pays participants.

Nous n’étions pas très concentrés, à vrai dire. On avait nos têtes. On donnait aussi nos notes. On faisait des paris. On imaginait des combines entre jurés pour faire gagner tel candidat plutôt que tel autre. C’était un peu idiot mais on s’amusait bien. Nous n’en étions pas à parler politique mais, avec les années, il nous a semblé qu’indiciblement celle-ci ne se désintéressait pas totalement de l’évènement, lequel a fini par réunir de plus en plus de pays participants au-délà des frontières européennes qui semblaient être les siennes lors de sa création.

Cette année la finale de l’eurovision aurait dû se tenir en Ukraine, pays vainqueur de l’édition 2022 mais, pour les raisons qu’on imagine, elle se tiendra en réalité à Liverpool. Volodymyr Zelensky souhaitait s’adresser au public du concours via un message vidéo. Refus des organisateurs.

« Un des piliers de la compétition est la nature non politique de l’événement. Ce principe interdit les déclarations politiques ou assimilées durant le concours. »

Un hommage appuyé à l’Ukraine est néanmoins prévu, avec la présence de onze artistes ukrainiens sur scène, dont Kalush Orchestra, le vainqueur de l’édition 2022 et des clips vidéo diffusés durant la soirée donneront à voir différents endroits du pays, a-t-il été précisé.

Pas de mots, donc, mais des images (tournées où, quand ?). Comme si elles étaient insusceptibles de porter par elles-mêmes une dimension politique. Qui, dans les replis de son cerveau, ne leur accolera pas d’autres images egrenées depuis plus d’un an maintenant ?

Mon dernier séjour à Lecumberri remonte à 1977, année où j’ai également cessé de regarder la finale de l’Eurovision.

Illusionnistes sorciers

Train Paris-Bordeaux. Ma voisine travaille sur un power-point « managérial ». Je dis cela parce que, pour le peu que j’en voyais, il s’agissait, en très gros, de faire « produire » une réunion. J’en imaginais d’ailleurs bien le genre, ayant eu le temps d’en « profiter » largement durant les derniers mois de mon activité professionnelle. Un temps où confrontés à une novlangue insupportable et des « incitations » très gazeuses, nous avions été assez nombreux à nous défaire des corvées en pastichant le style qui nous était imposé. Tant qu’à répondre à ce bla bla pompeux dont les finalités (restructuration des équipes) étaient, elles, parfaitement identifiables, autant le faire en s’amusant un peu au passage .

J’en étais là de mes songeries lorsque apparut sur l’écran de l’ordinateur le sigle ChatGPT. Ma voisine tapa une courte requête et quelques secondes plus tard s’afficha un long paragraphe dans lequel elle piocha pour enrichir son fichier. Etait-ce une nouvelle consigne ou la réitération d’une ancienne ? Impossible à savoir mais le résultat m’apparut sur le coup Impressionnant. Même le plus aguerri des pisse copie n’aurait pu sortir un texte aussi vite. J’en vins même à me demander si mon ancienne profession perdurerait dans ce contexte.

Peu de temps après, je tombe sur cet article du journal Le Monde.

https://www.lemonde.fr/pixels/article/2023/05/02/geoffrey-hinton-pionnier-de-l-ia-quitte-google-et-dit-regretter-son-invention_6171773_440899

J’y apprends que l’intéressé redoute notamment que « les gens normaux ne puissent plus distinguer le vrai du faux ». Je ne sais pas quelle est la « normalité » qu’il vise, mais passons. Quant à ne plus distinguer le vrai du faux, la question me semble remonter à la plus haute antiquité mais, disons, que le vraisemblable se perfectionne dangereusement. comme il est raconté ci.

Alors, que faire ? Je ne sais. La question oiseuse que je me pose à ce stade un peu désespérant est celle-ci : l’intelligence artificielle aura-telle un jour de l’humour ?

En attendant on peut s’amuser de ces variations sur quelques lignes du dernier opus de notre ministre de l’économie, écrivain coquin à ses heures dont la drôlerie ne m’a jamais semblé être la qualité première : Bruno Le Maire.

Post scriptum : je découvre ceci sur twitter : un twittos a donné l’extrait du livre de Bruno Le Maire à ChatGPT et lui a demandé d’écrire un texte sur la réforme des retraites dans le même style. On peut considérer le résultat comme assez humoristique finalement.

Futilités en R

Rochers

C’est la seule mesure que la ville de Calais a trouvée pour empêcher les migrants d’installer leurs camps : la pose de centaines de pierres. Gageons que ce banc public en milieu hostile n’accueillera pas beaucoup d’amoureux impatients de se bécoter

Regrets

Faut-il regretter d’avoir voté contre le mariage pour tous pour devenir premier ministre ? C’est à se le demander tant les mea culpa de personnalités qui s’y verraient bien se succèdent : Darmanin, Béchu, Vautrin …. ! Bruno Le Maire, qui peine à cacher sa convoitise pour le poste, s’était abstenu alors, le regrettera-t-il aussi ?

Recueillement

Un homme et une femme récitent l’angélus, prière qui rappelle la salutation de l’ange à Marie lors de l’Annonciation. Ils ont interrompu leur récolte de pommes de terre et momentanément abandonné fourche, panier, sacs et brouette.

L’œuvre est célèbre et a fait l’objet de nombreuses « variations », les plus célèbres étant celles de Dali qui consacra d’ailleurs un livre entier au tableau.

Dali, Réminiscence archéologique de l’Angélus de Millet, 1935.

Caricatures, bandes dessinées, clips, boîtes à épices ou de biscuit … on la retrouve un petit peu partout, voire même dans l’actualité. Ou plutôt, je ne sais pourquoi cette photo m’a fait penser à l’Angélus. Ma culture picturale n’étant pas encyclopédique (c’est un euphémisme), il y aurait sans doute rapprochement plus pertinent à faire mais, en la regardant (sont-ce les mains jointes?), c’est l’Angélus qui m’est venu.

De l’angélus au « caddie anti-inflation » …les vagabondages sont mystérieux.

Relève

Elle s’appelle Sophie Binet et ne semble pas avoir froid aux yeux. Elle aime aussi les chapeaux, ce qui nous change de la moustache de son prédécesseur.

Cela lui donne un petit côté gibi – ce petit personnage des Shadoks coiffé d’un chapeau melon qui lui donne sa supériorité intellectuelle – à cette différence près que la cervelle de Sophie est sous le chapeau et non dedans.

Réminiscences

Upon the wings of music. C’est un des premiers disques que je me suis offert. Une pochette de nuages avec un visage juvénile en surimpression.

Jean-Luc Ponty. Je l’avais perdu de son et de vue, m’étant laissée distraire par un autre violoniste : Didier Lockwood. Et voilà que je tombe sur ce morceau, interprété avec un compère dont je possède également quelques opus : John Mac Laughlin. Sur fond de sitar et tablas me voilà aussi revenue en Inde. C’était il y a presque 11 ans.

Je flotte un peu dans tout ce temps.

Jean Luc et John ont maintenant chacun 80 ans mais, pour le premier, c’est toujours le visage sur fond bleu ciel que j’ai en tête.

Batterie de cuisine

Ceci n’est pas une casserole mais un « dispositif sonore portatif ». Cela pourrait prêter à sourire et certains apprenant que ce « dispositif » était interdit en manifestation à Ganges dans l’Hérault en ont même parfois ri. Sauf que, lorsqu’un arrêté préfectoral en vient à prohiber l’usage de ce genre d’outil en s’appuyant notamment sur la loi « sécurité globale préservant les libertés », la loi « relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement », ainsi que le plan Vigipirate « sécurité renforcée – risque attentat », on se demande si on a pas atteint le fond d’un inquiétant ridicule,

Jusqu’où n’iront-ils pas ? On aurait tort de minimiser l’inventivité administrative. Que nous restera-t-il alors : la voix, siffler entre ses doigts (si on y arrive) ou l’attentat pâtissier juridiquement risqué ? Les deux professeurs attaqués en justice par Jean-Michel Blanquer, pour l’avoir aspergé de chantilly, ont été condamnés à 300 euros d’amende chacun. Je ne sais pas si, comme ils l’envisageaient, ces dangereux prévenus ont fait appel de leur condamnation.

Vu les moyens policiers mis en oeuvre pour sécuriser les déplacements du Président, il faudrait d’ailleurs balancer le gâteau attentatoire à la catapulte pour lui permettre de passer le périmètre de sécurité organisé autour de sa personne.

Alors qu’il était encore ministre de l’Économie, E. Macron évoquait le vide laissé par « la figure du roi », dont « le peuple français n’a pas voulu la mort ». Porté par une majorité confortable à l’Assemblée nationale, composée essentiellement de primos-élus, le Président a dévoilé, au cours de son premier quinquennat, un sens très vertical de l’exercice du pouvoir. La donne représentative a un peu changé depuis l’an dernier sans influer sur sa « pratique des institutions ». Peut-être même a-t-elle paradoxalement aggravé cette verticalité revendiquée.

L’ « apaisement tour » aux accents impériaux, mal embarqué, si on en juge par ses premières rencontres, très millimétrées pourtant, avec « les Français », aurait tendance à le confirmer, je trouve.

« Il y a une Constitution, c’est le président qui décide et y a un Parlement qui accorde ou pas la confiance par des textes ou des motions de rejet, c’est simple hein » a-t-il affirmé lors de sa visite alsacienne. Ce qui constitue une interprétation toute personnelle des dispositions selon lesquelles « le Président de la République veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État » (art.5 de la Constitution). Et le Gouvernement dans tout ça, censé déterminer et conduire la politique de la nation (art. 20 de la Constitution) ? Un attelage de simples collaborateurs. Où l’on voit ce que le macronisme emprunte parfois à l’hyperprésidence srakozyste.

Alors que bruissent des rumeurs de remaniement à l’issue de ces « cent jours d’apaisement », Jean François Copé, bygmalien, ancien ministre et toujours maire de Meaux, juge que le Président est le grand gagnant de cette séquence « réforme des retraites ». Une offre de services subliminale ?

Pouvaient-ils faire pire ?

Je me souviens des guignols de l’info de la grande époque de Canal + et de la marionnette Jean-Marie Le Pen dont la réponse la plus fréquente aux questions qu’on lui posait était : « j’attends ». Son héritière aurait tort de déroger à cette devise. Le pouvoir actuel travaille pour elle.

Ce qu’il y a de constant avec le Conseil Constitutionnel, c’est qu’on a beau ne pas en attendre grand chose, on est quand même déçu. Ainsi donc, l’institution de la rue de Montpensier qui tenait, selon le professeur de droit constitutionnel Dominique Rousseau, l’occasion de montrer son « indépendance » en jouant « pleinement son rôle de gardien du bon fonctionnement de la procédure et du débat parlementaire » a préféré valider froidement l’essentiel de la réforme sur les retraites jugeant tout au plus que « l’utilisation combinée des procédures mises en œuvre a revêtu un caractère inhabituel », sans pour autant « rendre la procédure législative contraire à la Constitution ». Peu importe que l’esprit ayant conduit à l’insertion de l’article 47 alinéa 1 de la constitution, à savoir le contrôle par le Parlement des lois de financement de la sécurité sociale, ait été quelque peu « sollicité » pour limiter le temps du débat parlementaire sur les retraites. La demande de référendum d’initiative partagée déposée en mars par l’opposition a été sèchement rejetée et celle nouvellement présentée ces derniers jours risque fort de l’être tout autant. Résultat en mai.

Tout à sa joie de la décision des « sages », le Président de la République a promulgué la réforme sans attendre et, après avoir refusé de recevoir les syndicats durant toute la séquence « retraite », leur ouvre maintenant les portes de l’Elysée tandis la Première ministre avec son tact singulier tweete parallèlement : « Ce soir, il n’y a vainqueur ni vaincu ».

Circulez, il n’y a plus rien à voir et embrassons nous Folleville.

Je crains que les choses ne soient un peu plus compliquées et que ce quinquennat n’en ait pas fini avec la colère. A moins, ce qui serait peut-être pire, que le pays, cette colère retombée, ne sombre dans une apathie ouvrant une autoroute durable à Marine.

« Le peuple uni ne sera jamais vaincu », chantaient les Quilapayun quelques mois avant le coup d’Etat au Chili. Ce pianiste en fait une interprétation presque mélancolique qui me semble tutoyer ce jour où le Conseil Constitutionnel me paraît avoir ouvert une drôle (sic) de boîte de Pandore. Comme le fait remarquer la journaliste Ellen Salvi de Médiapart, si l’extrême droite devait arriver au pouvoir, elle pourrait revendiquer avec sincérité sa continuité de la pratique institutionnelle, mêlant mépris du Parlement, annihilation de la démocratie sociale et répression policière des contestations.

Interminable

Au delà du feuilleton sur les retraites, je veux parler de ce quinquennat.

Le Conseil constitutionnel mettra-t-il fin au premier le 14 avril prochain ? Les « sages » vont-ils considérer que l’utilisation successive des articles 47, alinéa 1, 44, alinea 3 puis 49, alinéa 3 de la Constitution a porté atteinte à la clarté et sincérité des débats ? Rien n’est moins sûr. Cette institution n’a que très rarement invalidé une loi dans sa globalité. Alors ? En gros 3 scenarii peuvent être envisagés : une censure des seules dispositions considérées comme des « cavaliers » car ayant un lointain rapport avec l’objet du projet de loi -ici le CDI senior et l’index senior-, une décision assortie de réserves sur le texte ou encore … une sorte de « compromis ». Selon le Canard enchaîné, en effet, une menace plus sérieuse planerait sur le projet : le référendum d’initiative partagée, une procédure permettant à un cinquième des membres du Parlement, soutenu par un dixième du corps électoral, de soumettre une proposition de loi au référendum.  252 parlementaires ont déjà déposé une demande en ce sens avec pour objectif de fixer l’âge de départ à la retraite à 62 ans maximum. Le Conseil constitutionnel pourrait alors décider de valider en même temps la demande de référendum et la loi, la première n’empêchant pas la promulgation de la seconde mais étant de nature à hypothéquer son avenir sauf si la « rue » battait en retraite (sic), ce qui au vu des sondages ne semble pas être le cas pour l’heure.

Après l’avoir snobée pendant des mois, la première ministre envisagerait de recevoir l’intersyndicale le 5 avril, soit la veille d’une nouvelle journée de manifestation. Mais pour parler de quoi si le report d’âge n’est pas négociable ? Ce semblant de reculade est bien dans le genre de la dame et je gage que la manœuvre vise surtout à s’attacher Laurent Berger considéré comme le maillon faible de ladite intersyndicale. Ce sera en tous cas l’occasion pour elle de « tester » la nouvelle secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet. Gardera-t-elle la ligne du général Tapioca (P. Martinez) ?

Emmanuel Macron est, quant à lui, passé à la suite : l’eau car il y a urgence. 80 % de nos nappes phréatiques sont à un niveau « bas » ou « très bas », selon le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM), contre 50 % l’an dernier, à la même période . Peut-être aurait-il dû commencer par ce dossier là plus préoccupant et moins clivant que l’état des caisses de retraite. Surtout quand on envisage de relancer le nucléaire.

Ce qui me ramène au début de ce billet. « Putain 2 ans » répétait la marionnette Chirac des anciens guignols de l’info de Canal +. Deux ans qui le séparaient des élections de 1995. Au plus bas dans les sondages il lui fallait tenir face à un Balladur alors triomphant. A son image, je serais assez encline à m’exclamer : « Putain encore 4 ans » tant cette première année de deuxième quinquennat m’a paru longue. C’est un peu comme les températures ou les mètres carrés immobiliers : il y a le réel et le ressenti.

A l’heure où le site Blast essaie de relancer le concept des guignols avec ses « marioles » pas très drôles, souvenons nous.

Fin de partie ou da capo ?

Saura-t-il se montrer à la hauteur de son rôle ? Je ne parle pas du Président de la République mais du Conseil Constitutionnel. Selon Laureline Fontaine, professeure de droit public et autrice d’un ouvrage intitulé « La Constitution maltraitée », il y a lieu de se poser des questions.

Composition excessivement politique (ses membres sont désignés par le Président de la République et les présidents des assemblées parlementaires, à savoir Assemblée nationale et Sénat), problèmes d’impartialité, règles de déontologie peu contraignantes, mauvaise qualité de l’argumentation juridique… Lauréline Fontaine met à mal la mythologie d’un Conseil constitutionnel s’étant émancipé du pouvoir exécutif pour devenir le gardien des droits et des libertés publiques. Des « sages » dit-on. « Le Conseil constitutionnel […] tire profit de l’importance et de la noblesse de sa mission, sans essayer jamais de se hisser à la hauteur » cingle-t-elle en conclusion d’un entretien avec des journalistes de Médiapart. L’émission est ici mais il n’est pas sûr qu’elle soit en accès libre.

https://www.mediapart.fr/journal/politique/150323/le-conseil-constitutionnel-ne-joue-pas-le-role-de-contre-pouvoir

Au sein de cette institution figure un homme qui, en 1995, se confronta à un mouvement de grève dur et prolongé (et nous aussi), contre un plan qui comportait entre autres :

  • un allongement de la durée de cotisation de 37,5 à 40 annuités pour les salariés de la fonction publique. Cette mesure avait déjà été décidée pour les travailleurs du secteur privé lors de la réforme Balladur des retraites de 1993 ;
  • l’établissement d’une loi annuelle de la Sécurité sociale qui fixe les objectifs de progression des dépenses maladies et envisage la mise en place de sanctions pour les médecins qui dépassent cet objectif ;
  • un accroissement des frais d’hospitalisation et des restrictions sur les médicaments et traitements remboursables ;
  • le blocage et l’imposition des allocations familiales versées aux familles, combiné avec l’augmentation des cotisations maladie pour les retraités et les chômeurs.

Le 15 décembre 1995, le gouvernement retira sa réforme sur les retraites, la fonction publique et les régimes spéciaux (SNCF, RATP, EDF), cette décision étant interprétée comme une victoire par les syndicats de salariés. Mais il refusa de céder sur la Sécurité sociale, dont le budget est depuis voté au Parlement (modification constitutionnelle historique par rapport à 1945). Un « sommet social » se tint à Matignon le 21 décembre, concluant un mois d’agitation sociale en France.

Les réformes des retraites de 2003, 2010 et 2013 viendront en quelque sorte, en partie, « réparer l’affront », mais que pense-t-il ?

Pour moi, je n’ai pas souvenir de violences telles que celles que nous voyons aujourd’hui. Pendant un mois, je me suis levée aux aurores (4-5 heures du matin). Une de mes collègues venait me « prendre » en voiture sur le périphérique parisien environ une heure, une heure et demie plus tard et pour nous détendre (on en avait besoin et bien pour une heure, une heure et demie de pare-choc contre pare-choc avant d’arriver au siège de l’entreprise), on écoutait les rediffusions des sketchs des « guignols de l’info » à la radio. On quittait le bureau quand la voie semblait possible, en espérant ne pas rester coincées sur le trajet retour (cela nous est arrivé une fois, nous sommes parties vers 15 heures, elle avait un RV médical à 19 heures et elle n’a pas pu y arriver à temps). Ce fut, pour moi, une période compliquée. Je récupérais le WE le sommeil perdu en semaine et je repartais le lundi comme une imbécile. Trop lâche pour perdre une journée de salaire alors même que je comprenais le mouvement social.

Aujourd’hui, le télétravail permet une relative continuité laborieuse et certaines unités policières désinhibées (Bac et BRAV-M en particulier) cognent, LBDisent et gazent sans sommation. Les crises économique et sociale ont fait se rejoindre (pour l’heure) des populations (jeunes et moins jeunes) qui ne se considéraient pas vraiment et des syndicats qui se faisaient la gueule.

Retoquer une réforme mal ficelée et ayant donné lieu à tous les artifices constitutionnels pour trouver une sortie conflictuelle, mérite qu’on regarde au-delà d’une censure cosmétique portant sur l’article relatif à l’index senior en particulier. Ce serait ajouter de la colère à la colère.

Avoir exercé des fonctions politiques ne dispense pas de renouer avec la politique, c’est à dire s’intéresser à la cité, ni d’être intelligent.

En seront-ils capables ? Je croise les doigts.

En attendant Charles III maintient sa visite…je serais à sa place (Dieu m’en préserve) je ferais lanterner notre roitelet jusqu’à des temps plus calmes. Les précédents Charles britanniques n’ont pas été excellemment servis, je crois. Charles III avait prévu de venir à Bordeaux (fidèle à la couronne d’Angleterre pendant la guerre de cent ans) où de vieux souvenirs traînent peut-être encore. Not a good idea Your Majesty, I would say. Take your time.

En attendant, cette singulière réflexion sur les retraites

PS : Finalement la visite de Charles a été annulée par notre roitelet. En même temps (sic) quel dommage. Let’s be punk for a while ! Mais voilà, Manu était trop jeune, alors, pour cela et trop vieux aujourd’hui. Mais a-t-il seulement été jeune un jour ?